samedi 26 novembre 2011

La Nuit


J'emprunte à François Taillandier, dont j'étais précisément en train de lire "Time to Turn" au moment même de poster ce billet, ce passage à la fin de son roman :
«En l'an 2006, la population urbaine dépassa le seuil de 50% de la population mondiale totale. Deux ans plus tard, en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, dans bon nombre de pays d'Europe et d’Afrique ainsi qu'en Australie, cette proportion dépassait 75%.
On s'aperçut alors que la majorité des êtres humains ne voyaient plus jamais la nuit. Lorsque la rotation de la terre les faisaient plonger dans l'ombre, ce qu'ils voyaient, s'ils regardaient le ciel, était obscur, mais ce n'était plus la nuit. L'éclairage des rues, des avenues, des immeubles, des magasins, des monuments se réfractait dans la brume de pollution atmosphérique qui flottait sur les mégapoles, créant un brouillard indistinct aux reflets vaguement violine ou orangés.[…] La Nuit, la grande Nuit, celle des loups et des croquemitaines, celle de la hulotte et de la pipistrelle, celle d'Andromède et de Bételgeuse — la Nuit se retirait, couverte de ses voiles, comme une veuve offusquée.»

Cette Nuit-là mérite bien sa majuscule, Nuit de Chanteuges qui se tient si majestueuse près de l'abbaye, où volètent les chauve-souris du cloître, pendant que la hulotte crie son cri de chasse dans la forêt.
J'aurai vécu 25 années sans voir de la nuit guère autre chose que les reflets de l'éclairage sur les trottoirs mouillés, je la redécouvre ici, troublante et obsédante, si grande en effet, avec sa lune et toutes ses étoiles.

Voir ce que j'avais écrit en 2008 sur la Nuit de Chanteuges.